INNER SANCTUM MYSTERIES: THE COMPLETE MOVIE COLLECTION (1943-1945)
(Voici un texte de l’an dernier que j’ai retravaillé ici :)
Si la série Universal Monsters est une des plus célèbres du vénérable studio, la sortie de ce coffret nous rappelle que la série
Inner Sanctum avait également bénéficié d’un certain succès. Mettant en vedette
Lon Chaney Jr., ce groupe de films (tous d’une durée d’un petit peu plus d’une heure) a vu le jour suite à la popularité d’une émission radiophonique du même nom. Adaptant des mystères policiers parfois à la limite du fantastique ou du macabre, ces films furent une façon de contenter Chaney, qui en avait assez de jouer les éternels croque-mitaines. L'acteur prêtait sans relâche ses traits fatigués à Dracula, le monstre de Frankenstein, Kharis la momie ou encore Larry Talbot le loup-garou et en avait marre, surtout d'être comparé à son légendaire père, L'homme aux mille visages.
Curieusement, Chaney joue ici des hommes sophistiqués, bien en vue socialement (médecin, chercheur, avocat, etc.), portant somptueux complets et courtes cravates… et même une petite moustache à la Errol Flynn pour le rendre encore plus « homme du monde ». Force est de constater que ce genre de personnages ne lui convenait guère : Chaney semble un peu trop souvent mal à l'aise et joue sur le même registre dans chacun des six films. Curieusement pour un comédien au tempérament un peu bourru et plus habitué à interpréter des brutes, des monstres ou encore des innocents naïfs, il est ici plus souvent qu'autrement au cœur de triangles amoureux passionnés… en d’autres mots, l'écurie d’interprètes féminines des séries B d'Universal ne peuvent se passer de lui! Un véritable « chick magnet »! Oh baby!
Les cinq premiers films Inner Sanctum débutent tous avec la même introduction : une tête flottant dans une boule de cristal qui nous rappelle que n'importe qui peut commettre un meurtre… même vous. Oui, vous! Suit alors le générique, sur un fond de fumée. Inexplicablement, Pillow of Death ne contient pas cette séquence d’intro marrante.
CALLING DR. DEATH offre un Chaney expert en hypnotisme se retrouvant accusé du meurtre de son épouse infidèle. Pourra-t-il retrouver sa mémoire d'un week-end perdu pour prouver son innocence?
Peut-être le meilleur épisode de toute cette imposante poutine demeure WEIRD WOMAN, où l'élément fantastique est un peu plus présent, avec une menace supposée vaudoue qui pourrait venir de la nouvelle épouse « indigène » de notre héros. Est-ce cette dernière qui lance des sorts? D'où proviennent ces sons de tambours barbares?
DEAD MAN'S EYE contient la meilleure séquence d’horreur pure de la série, quand Chaney en artiste peintre se frotte par erreur les yeux avec de l'acide! Le gros plan de son faciès vaut à lui-même le prix d'entrée. La divine Acquanetta est également présente au générique, toujours aussi raide que dans son rôle phare de Captive Wild Woman, un an plus tôt. Mais quand tu es agréable à regarder…
Vient ensuite THE FROZEN GHOST, où un hypnotiseur (encore eux!) accusé de meurtre trouve refuge dans un musée de cire. Ici, quelques subtiles touches d'horreur résultent à un acceptable épisode et Martin Kosleck joue un vilain maniéré et constipé, que seul lui pouvait interpréter de la sorte.
STRANGE CONFESSION demeure plus un mélodrame social qu'une vraie intrigue policière. Voir Chaney en père de famille qui fait taire son nourrisson braillard (couché dans la litière!) en lui fourrant un bonbon dans la bouche vaut son pesant d’or. On espère que la scène finale nous montrera ce qu'il y a vraiment dans la mystérieuse valise du héros… mais la censure des années quarante veillait au grain.
On boucle la boucle avec le pénible PILLOW DEATH qui n'offre pas vraiment de surprises, avec un scénario guimauve de meurtres bizarres dans le domaine peut-être hanté d'une vénérable famille.
Un des problèmes majeurs de ces films est le fait que la distribution est tellement minime, qu'il demeure aisé d'identifier le (ou la) coupable assez tôt, faute d’une bonne brochette de suspects. Chaney, plus ou moins dans son élément, offre quand même un travail sincère qui l'honore. Il y avait quelque chose dans la personnalité de l'acteur qui résulte de notre part à un curieux plaisir de le voir dans le trouble (pour ne pas dire « dans la marde », mes excuses à nos amis européens du Club). Le voir en sueurs grincer des dents à un je-ne-sais-quoi de satisfaisant. Rappelons que Lon Jr. avait été tout simplement génial dans le meilleur rôle de sa carrière, Lenny dans OF MICE AND MEN en 1939 («
Georges! Le lapin! »).
Curieux contraste de constater que ces petits films majoritairement médiocres se laissent tout de même bien regarder, surtout les quatre premiers. On reconnaît avec bonheur plusieurs comédiens de soutien d’Universal, pour la plupart en forme ici. Les metteurs en scène (Reginald Le Borg, Wallace Fox, Harold Young et John Hoffman) sont tous des techniciens habitués à de telles commandes. L'amateur de vieux films d’horreur pourra prendre un certain intérêt, mais le spectateur aux goûts plus modernes trouvera le tout d’un ennui mortel.
Si Chaney Jr. pensait devenir un acteur romantique de premier plan avec tout ceci, il se trompait. Ou encore a été dupé par les dirigeants d’Universal («
Juste un autre film de momie, Lon. Juste un. »). Le reste de sa carrière le verra se transformer en acteur de soutien de qualité (HIGH NOON, par exemple), tout en continuant à être vedette de films d'épouvante souvent confondants (INDESTRUCTIBLE MAN ou encore le DRACULA Vs. FRANKENSTEIN de 1971, tu parles d’une dégringolade).