JOURS TRANQUILLES A CLICHY - Claude Chabrol avec Andrew Mac Carthy, Nigel Havers, Barbara de Rossi, Stéphane Audran, Stéphanie Cotta, Anna Galiena, Mario Adorf, 1989, France/Italie/Allemagne, 2 plombes
J’aperçois hier soir Claude Chabrol dans une émission télé. Comme il confesse visionner occasionnellement quelques X, on lui demande si l’envie d’en tourner ne le taraude jamais. « J’ai déjà tourné Jours tranquilles à Clichy où je suis allé jusqu’au bout de ce qui était montrable avant la pornographie » explique-t-il « … et puis j’ai aussi fait quelques films érotiques pas très bons. »
Evidemment, ni une ni deux, je décroche la pioche, j’empoigne la lampe de poche et je fonce mettre des coups dans les buttes de VHS entassées au fond de mon 34 mètres carrés. Eurêka la boiboite : « une soirée peinarde à Amiens » en perspective.
Il s’agit donc d’une adaptation du fameux roman d’Henry Miller, nous suivont l’écrivain américain, jeune, avec sa chemise blanche et ses lunettes rondes, qui déboule dans un Paris des années trente en grossier carton pâte (j’espérais presque le voir croiser Casimir de l’île aux enfants) : il se rend à des soirées libertines dans des cabarets farcis de trucs en plumes, il rentre tripoter la remington dans un apparte décoré avec des posters de Marcel Proust, il repart aux dames vérifier des nichons, il pédale en vélocipède sur les falaises d’Etretat, il squatte dans un atelier de photos cochonnes, il se met une tête au rouge qui tâche avec son poteau Julot, il sort une phrase dans le style « j’aime l’amour pendant que je le fais, mais après j’ai l’impression que je suis mort », il esquive une manifestation de communistes (une bande de quatre) poursuivis par la gendarmerie à cheval (autant de chevaux que de communistes), il cavale une enfant de quinze ans (une actrice petite avec des couettes), il négocie son manuscrit auprès de Mario Adorf qui lui conseille d’écrire plutôt des Hercule Poirot, il se douche avec entrain chez une professionnelle, il roule dans une Panhard piquée aux brigades du tigre avec le vent dans les cheveux, il fait des clins d’oeil à une rousse, il ouvre les volets d’une maison de campagne, il prend des notes au sujet de la révolution russe de 1917 racontée par une aristocrate qui se caresse le frou-frou, il bavarde sans cesse en français pénible avec un accent breton digne d’une pub de cosmétique, et vers la fin deux chinoises soulèvent leur jupe.
En outre survient un effet « à la citizen kane » : on le retrouve grimé en vieillard en train de claboter dans une chambre, en compagnie d’une gamine fraîchement rasée sous les aisselles (voir la jaquette et probablement l’affiche du film), il se retient de lâcher le « rosebud » entre ses dents.
Les femmes voilées en noir qui, par intermittence, avancent lentement dans un paysage de désert flouté, doivent figurer la mort qui tue en général tout à la fin.
La distribution internationale – un groupe de têtes d’afffiche en chute libre - est débarquée au milieu d’actrices peu frileuses. Comme d’habitude chez Chabrol maintenant, on retrouve sa famille partout (musique, distribution), dont son ex-femme Stéphane Audran.
Le film est souvent éclairé au néon, ce qui m’a vivement rappelé l’ambiance joyeuse du bureau.
Pendant les deux heures longuettes, je me suis dit que je ferais mieux de revoir « Lune de fiel » de Polanski, qui navigue dans les mêmes eaux, m’enfin faudrait retourner à la pioche.
En conclusion : pleins de bonnes intentions, qui ciblent probablement le troisième âge - inconditionnel des années trente -, et puis les étudiants en faculté de lettres modernes qui se dispenseront donc d’en chercher davantage au sujet d’Henry Miller et de Marcel Proust.
Sinon au milieu des fouilles j’ai aussi remis la main sur « Alice ou la dernière fugue » de 1977 avec Sylvia Kristel, mmmmmh on verra plus tard.
Bigeyes