LES LARMES D'UN HEROS de John Woo (1983)
Une bande de mercenaire est chargée par le gouvernement thaïlandais de kidnapper un baron de la drogue planqué dans le triangle d'or...
On peut voir dans ces larmes, le premier volet d’une trilogie consacrée à la guerre, suivi d"Une balle dans la tête" (1990) et clôt par "Windtalkers, les messagers du vent" (2004). Tourné trois ans avant l’apothéose stylistique du "Syndicat du crime", "Les larmes d’un héros" (un beau titre, très représentatif de l’œuvre de John Woo) reste néanmoins important dans la carrière du maître puisqu'on y trouve ses premiers gunfights qui débourrent. Mais de manière un peu brouillonne toutefois, car si ça canarde violemment pendant 1h20, le résultat n’est pas encore suffisamment virtuose pour être comparé aux grandes réussites à venir. Cela dit la
Woo’s touch est parfois reconnaissable avec ses ralentis et ses brusques travellings qui balayent le champ dans le feu de l’action. L’histoire est aussi traitée de façon élégiaque, tragique et jusqu’au-boutiste et les thèmes fétiches du cinéaste sont déjà présents : la famille, l’amitié, la loyauté, le sacrifice et la perte de l’innocence. Le héros (Eddy Ko) est prêt à tout pour protéger son gamin, tandis qu’une amitié indéfectible le lie à un soldat américain planqué au fin fond de la jungle.
Malheureusement, ces bonnes intentions sont partiellement ruinées par les producteurs qui défigurent "Les larmes d’un héros" avec deux scènes comiques à la ramasse (un des membres du commando s’amuse à tout parier avec ses dés) et une érotique complètement gratuite (une partie à trois entre le G.I et deux jolies chinoises). Des rajouts embarrassants qui jurent avec le sérieux et la gravité voulu par son auteur. Dans l’interview proposée en bonus par la galette "HK" d"Une balle dans la tête", John Woo explique que les producteurs ont fait tourner ces scènes par un autre, sans lui demander son avis, histoire de cadrer davantage avec leurs exigences commerciales.
Petit budget oblige, un côté cheap se dégage parfois des séquences gores (le soldat empalé par plusieurs lances) donnant à l’œuvre des allures de films d’exploitation. Et ce n’est pas forcément déplaisant puisque le rendu reste assez efficace, finalement. Un film attachant aussi et pas dénué d’intérêt dans le sens où il annonce le monument le plus puissant et le plus personnel de Woo : "Une balle dans la tête", dont "Les larmes d’un héros" en constitue la sympathique ébauche.